Tous comptes sociaux d’une entreprise doivent être déposés annuellement. Plus précisément, il s’agit d’un ensemble de documents que doivent déposer toutes les sociétés commerciales au niveau de leur antenne locale du CNRC. En Algérie, le dépôt des comptes sociaux se fait un mois après la tenue de l’Assemblée générale de l’entreprise. Cette dernière doit être effectuée entre le 1er janvier et le 30 juin de chaque année. Le délai maximum de dépôt des comptes sociaux auprès du CNRC est donc le 31 juillet.
Quelle est la sanction prévue en cas de retard de publication des comptes sociaux annuels?
Sanction initiale du défaut ou du retard de publication des comptes sociaux
L’article 192 –1) du CIDTA prévoit que “le contribuable qui n‘a pas produit la déclaration annuelle, selon le cas, soit à l‘impôt sur le revenu, soit à l‘impôt sur les bénéfices des sociétés est imposé d‘office et sa cotisation est majorée de 25 %”.
En clair la loi prévoit en cas de retard de dépôt des comptes annuels
- une imposition d’office
- Majoration de l'impôt
Puis, l’article 13 de la loi n°06-04 du 15 juillet 2006 portant loi de finances complémentaire pour 2006 institue, auprès de la Direction Générale des Impôts, un fichier national des fraudeurs, auteurs d‘infractions graves aux législations et réglementations fiscale, commerciale et douanière dont les modalités d‘organisation et de gestion sont déterminées par un décret n°13-84 du 6 février 2013.
Jusqu’alors lorsque les comptes annuels n’étaient pas déposés, en plus des sanctions fiscales énoncées précédemment, une inscription sur ce “fichier fraudeur” était systématique. Et les conséquences étaient telles que cette inscription entrainait la quasi totale paralysie de l’entreprise avec d’énormes difficultés de régularisation en pratique, tant la bureaucratie nécessaire pour la radiation de ce fichier était étouffante. Puis la Loi de finance pour 2011 a tenté de remédier à ces sanctions trop sévères, mais pour autant, il semblerait que la pratique reste figée sur l’ancien texte, continuant de sanctionner ces oublis avec autant de sévérité qui n’a en principe plus lieu d’être.
Le fichier national des fraudeurs
L’article 2 du Décret exécutif n°13-84 du 6 février 2013 fixant les modalités d’organisation et de gestion du fichier national des fraudeurs, auteurs d’infractions graves aux législations et réglementation fiscale, commerciale, douanières, bancaires et financières ainsi que le défaut de dépôt légal des comptes sociaux définit le fichier national des fraudeurs comme “une base de données centralisée des informations relatives aux auteurs d'infractions graves, aux législations et réglementations fiscales, commerciales, douanières, bancaires et financières, ainsi que du défaut de dépôt légal des comptes sociaux”
Ce fichier est alimenté par les services habilités du ministère chargé des finances, du ministère chargé du commerce et de la Banque d’Algérie. Plus précisément, les services de la direction générale des impôts assurent l’organisation et la gestion du fichier national des fraudeurs. Ce sont eux qui sont chargés notamment de procéder à l’inscription et au retrait des personnes physiques et morales n’ayant pas procédé au dépôt légal des comptes sociaux.
NB: Lorsque l’auteur de l’infraction est une personne morale, l'inscription s’étend à ses représentants légaux.
Conséquences de l’inscription au registre national des fraudeurs
C’est l’article 29 de l’ordonnance n° 09-01 du 22 juillet 2009, portant loi de finances complémentaire pour 2009 qui nous renseigne sur les conséquences d’une telle inscription au registre national des fraudeurs en ces termes : “L‘inscription au fichier national des fraudeurs, auteurs d‘infractions graves aux législations et réglementations fiscales douanières et commerciales, ainsi que le défaut de dépôt légal des comptes sociaux, entraîne, pour ces derniers, les mesures suivantes :
- exclusion du bénéfice d‘avantages fiscaux et douaniers liés à la promotion de l‘investissement ;
- exclusion du bénéfice des facilitations accordées par les administrations fiscales, douanières et de commerce ;
- exclusion de soumission aux marchés publics ;
- exclusion des opérations de commerce extérieur.”
Il est donc à noter ici la sévérité des mesures choisies et mises en oeuvres en cas d’inscription sur ce fichier fraudeur pour une société qui aurait commis un simple oubli de remise des comptes annuels dans les temps. Cette société se verrait donc privée d’importer, d’exporter, de toute facilité douanière, fiscale ou autre privilège. En résumé, l’entreprise concernée se verrait grandement pénalisée dans ses actes de gestion et dans son intention de commercer dans son ensemble. Et même s’il est bien entendu possible de régulariser en vertu du même décret, cette régularisation n’est pas si simple en pratique. Elle relève d’une bureaucratie lourde et pesante en pratique puisqu’il fallait procéder à un tas de formalités administratives relevant des multiples administration (de la Wilaya au Ministère du commerce).
Conséquences en cas de régularisation du dépôt des comptes
L’article 6 du Décret exécutif n° 13-84 du 6 février 2013 prévoit que l’administration ou l’institution source de l’inscription d’une personne physique ou morale au fichier national des fraudeurs est tenue d’engager la procédure de son retrait immédiat suite à la régularisation de sa situation vis-à-vis de l’ensemble des motifs ayant justifié son inscription.
Le retrait d’une personne morale du fichier national des fraudeurs entraîne le retrait de ses représentants légaux, inscrits en cette qualité.
L’administration ou l’institution source d’inscription ou de retrait du fichier national des fraudeurs informe la personne physique ou morale concernée par cette mesure, dans un délai de quinze (15) jours, à l’adresse du lieu d’activité qu’elle a déclarée.
Ce délai court à compter de la date de signature de la demande d’inscription ou de retrait du fichier national des fraudeurs.
La réforme de la loi de finance 2021 concernant le dépôt de la déclaration annuelle
L’article 74 de la loi n° 20-16 du 31 décembre 2020 portant loi de finances pour 2021, afin de remédier à cette pesanteur et à l’extrême sévérité dont il a été fait preuve envers les entreprises qui voyaient leur activités mise en péril a souhaité modifier les dispositions de l’article 13 modifiées et complétées de l’ordonnance n° 06-04 du 15 juillet 2006 portant loi de finances complémentaire pour 2006. Le nouvel article 13 est rédigé comme suit :
« Il est institué, auprès de la direction générale des impôts, un fichier national d’auteurs d’infractions frauduleuses.
Sont inscrits à ce fichier, les auteurs d’infractions graves aux législations et réglementations fiscales, douanières, commerciales, bancaires et financières.
Les modalités d’organisation et de gestion de ce fichier seront déterminées par voie réglementaire ».
La loi en ce sens est claire ! Le fichier national d’auteurs d’infractions frauduleuses ne fait plus référence au défaut de dépôt légal des comptes sociaux. Ne sont donc plus considérés comme auteurs d’infractions frauduleuses les gérants ou entreprises n’ayant pas déposer leurs comptes annuels dans les temps auprès de l’administration, et par conséquent, il n’est plus possible de leur faire supporter les conséquences précédemment citées. La seule sanction serait en principe l’amende, éventuellement majorée de pénalités en cas de retard persistant; pénalités qui a d’ailleurs été revue à la baisse en raison de la crise sanitaire.
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