Tous actes qui rendent impossible l’appropriation d’un bien, afin d’attribuer l’usufruit aux nécessiteux ou à des œuvres de bienfaisance sont appelés Waqf. Ce bien est également appelé bien de mainmorte. Il relève des institutions religieuses, contrairement à l'héritage qui est le patrimoine qu'une personne décédée lègue à ses héritiers, et qui leur donne un droit de propriété sur leur héritage.
De quoi est exactement constitué le bien de mainmorte ? Quel est son régime juridique et comment procéder à sa dissolution ?
Signification d’un bien de mainmorte
Suivant l’article 213 de la loi n°84-11 du 09 juin 1984 portant code de la famille :
“La constitution d'un bien de mainmorte (waqf) est le gel de propriété d'un bien au profit de toute personne à perpétuité et sa donation.”
Ainsi, le bien de mainmorte (waqf) est un acte par lequel une volonté individuelle s’engage à faire une donation. Le constituant pourra jouir légalement d'un bien dont il n'aura pas la propriété et ce durant sa vie, avant l’attribution définitive au bénéficiaire.
Eléments constitutifs du bien de mainmorte
Selon l’article 9 loi 91-10 du 27 avril 1991 relative aux biens de waqfs. Les éléments fondamentaux du bien de mainmorte sont :
- Le constituant : pour que le contenu soit valable, il est exigé du constituant :
1) Qu'il soit propriétaire de l'objet de la fondation, d'une façon absolue,
2) Qu'il soit apte à disposer de ses biens et non frappé d'interdiction pour incapacité ou créance.
- La fondation : elle est constituée soit d’un bien meuble ou immeuble soit par un usufruit. La fondation doit être connue, déterminée et possédée par la personnalité licite.
La formule de la constitution du bien waqf est, soit verbale, soit scripturale, voire même par signe (parlé, écrit, mime), soit selon les modalités qui seront précisées par voie de dépôt .
Le dévolutaire est le destinataire désigné par l'acteur de bien waqf, il peut être une personne physique ou morale.
A savoir ! L’usufruit est la jouissance légale d'un bien dont on n'a pas la propriété.
Règles applicables au constituant d'un bien de mainmorte
Conformément à l'article 215 de la même loi :
Le constituant d'un bien de mainmorte (waqf) et le dévolutaire obéissent aux mêmes règles que celles applicables au donateur et au donataire conformément à la donation faite par une personne au cours d'une maladie ayant entraîné sa mort ou atteinte de maladie grave ou se trouvant en situation dangereuse.
La donation peut porter sur tout ou une partie des biens du donateur. Il peut faire donation d'un bien déterminé ou d'un usufruit ou d'une créance due par une tierce personne.
La validation de la constitution d'un bien de mainmorte
Selon les dispositions de l’article 217, la validation de la constitution d'un bien de mainmorte (waqf) s'effectue dans les mêmes formes que celles requises pour le testament. Or le testament est rendu valide par :
1°) une déclaration du testateur par devant notaire qui en établit un acte authentique ;
2°) un jugement visé en marge de l'acte original de propriété en cas de force majeure.
La gestion du bien wakf est soumise aux conditions imposées par le constituant tant que celles-ci ne sont pas réprouvées par la chariâ islamique. Il est permis au constituant de revenir sur certaines clauses de l'acte de fondation, s'il est stipulé ceci dans l’acte.
De plus, il est permis au juge d'annuler toute clause imposée par le constituant si elle est contraire au caractère impératif de la fondation ou nuisible au destinataire ou à ses intérêts.
La validité de l'acte de constitution annule la propriété du constituant. L'usufruit revient alors au dévolutaire dans les limites des dispositions et des clauses de l'acte de constitution. Le droit à l'usufruit du bien wakf est limité à un droit sur le produit. Le dévolutaire a un droit de jouissance et non un droit de propriété.
Exemple : si le Waqf est une école et que l'État se charge de la gérance, il lui est interdit de la vendre, de la donner, ou de la distribuer en héritage ni de l’employer sous une autre forme que sa forme initiale.
Le dévolutaire du wakf (l’Etat) pourra céder son droit d'usufruit sans que cela constitue une annulation de la fondation initiale.
S’ajoute à cela que nul ne peut aliéner l'essence du wakf, objet de jouissance, de quelque manière que ce soit (vente, donation ou désistement au profit d'une tierce personne).
La dissolution du bien de mainmorte
Toute constitution d'un bien wakf contraire aux dispositions de la loi relative aux biens de waqfs est nulle. De plus, selon l’article 29 et suivants de la loi 91-10 du 27 avril 1991 aux biens de waqfs prévoit que le waqf n'est point légalement valable s'il est stipulé une clause contraire aux textes de la charia islamique. Dans ce cas, la clause est nulle mais le waqf reste valide.
Tout waqf constitué par un enfant est frappé de nullité d'une façon absolue, qu'il soit capable de discernement ou qu'il en soit incapable, même s'il avait l'aval de son tuteur.
Le waqf constitué par le fou ou l'idiot n'est pas valable, puisque le waqf, est un acte d'aliénation du bien qui requiert la capacité de gérer ; cependant, la personne sujette à des crises de folie intermittente, peut constituer un waqf pendant sa reprise de conscience.
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