Après l'entrée en vigueur de la loi organique n° 23-14 relative à l’information précédemment abordée par Legal Doctrine dans un article antérieur, la loi n° 23-20 relative à l'activité audiovisuelle vient d'être promulguée, visant à encadrer de manière exhaustive l'exercice des activités audiovisuelles, définissant des règles claires et précises pour l'ensemble du secteur, qui englobe divers médias tels que la télévision, la radio, les plateformes numériques et les services web.
Cependant, la loi n° 23-20 établit des frontières nettes en ce qui concerne la participation des binationaux dans le domaine de l'activité audiovisuelle. Dans cet article Legal Doctrine émettra les principales dispositions relatives à cette législation.
Exclusion des binationaux de l’exercice de l’activité audiovisuelle
Contrairement à la loi n°14-04, la nouvelle loi n°23-20 relative à l’activité audiovisuelle prévoit que l’activité audiovisuelle est exercée par les médias relevant :
- Des entreprises et organismes du secteur public ;
- Des personnes morales de droit algérien dont le capital social est détenu par des personnes physiques de nationalité algérienne exclusivement ou des personnes morales de droit algérien, dont les actionnaires ou les associés sont de nationalité algérienne exclusivement .
Services de communication audiovisuelle
Les services de communication audiovisuelle sont divisés en deux types:
- Services de communication relevant du secteur public;
- Services de communication audiovisuelle autorisés.
Services de communication audiovisuelle relevant du secteur public
Le secteur public de l'audiovisuel englobe les entreprises dont la totalité du capital est détenue par l'État et les organismes publics. Ces entreprises ont pour mission, dans l'intérêt général, de poursuivre des missions de service public.
La personne morale exploitant des services de communication audiovisuelle relevant du secteur public bénéficie, en accomplissant ses missions, du maintien à son actif des moyens dont elle dispose, comprenant notamment les fréquences radioélectriques et les infrastructures. De plus, elle a droit à l'attribution prioritaire du droit d'usage de la ressource radioélectrique nécessaire à l'accomplissement des missions de service public spécifiées par les cahiers des charges.
La création et le statut des services de communication audiovisuelle relevant du secteur public sont déterminés par décret.
Services de communication audiovisuelle autorisés
Un service de communication audiovisuelle ou audiovisuelle en ligne autorisé est défini comme un service de diffusion télévisuelle, sonore, web TV, ou web Radio, soit généraliste, soit thématique. Ce service est créé par une personne morale de droit algérien et est légalement autorisé par le ministre chargé de la communication.
Conditions de création
La personne morale désirant bénéficier de l'autorisation de création d’un service de communication audiovisuelle ou audiovisuelle en ligne, généraliste et/ou thématique, doit satisfaire aux conditions suivantes :
- Justifier du statut de personne morale de droit algérien ;
- Justifier de la nationalité algérienne exclusive pour tous les actionnaires, les associés et le directeur du service de communication audiovisuelle ;
- Justifier que le directeur du service de communication audiovisuelle jouit d’une expérience avérée de huit (8) ans,au minimum, dans le domaine de l’information, attestée par l'affiliation à la caisse de sécurité sociale et titulaire d'un diplôme de l’enseignement supérieur ;
- Justifier de la jouissance du directeur du service de communication audiovisuelle, de tous les actionnaires et des associés de leurs droits civils ;
- Justifier la non condamnation du directeur du service de communication audiovisuelle, des actionnaires et des associés pour des affaires de corruption ou pour des faits infamants ;
- Justifier que les actionnaires et les associés nés avant juillet 1942, n’ont pas eu une conduite contraire à la Révolution du 1er Novembre 1954 ;
- Justifier de l'exclusivité nationale du capital social ;
- Prouver l’origine des fonds ;
- Justifier de la présence de journalistes ou des professionnels du secteur de l’information parmi les actionnaires et les associés ;
- Prouver que les actions constituant le capital social sont nominatives.
Octroi de l’autorisation de création de services de communication audiovisuelle
L’exercice d’une activité audiovisuelle nécessite l’octroi d’une autorisation accordée par le ministre chargé de la communication, par arrêté. Cette autorisation constitue l’acte de création d'un service de diffusion télévisuelle ou de diffusion sonore ou d’un service web TV ou web Radio.
Le régime de l’autorisation s’applique à la diffusion par câble ou à l’usage des fréquences radioélectriques par voie hertzienne, par satellite ou par internet en clair ou cryptée.
Le service de communication audiovisuelle en ligne s’exerce à travers un site électronique, dont l'hébergement est exclusivement et physiquement domicilié, auprès de l’organisme public de télédiffusion en Algérie et logiquement en Algérie, avec une extension du nom de domaine « .dz ».
Le ministère chargé de la communication met en œuvre la procédure d’octroi de l’autorisation dans le respect des principes d’objectivité, de transparence et de non discrimination, en tenant compte notamment :
- De la nature du service de communication audiovisuelle à créer ;
- De la zone géographique de couverture ;
- De la langue ou des langues de diffusion ;
- De toutes autres informations et prescriptions techniques complémentaires que l’organisme public chargé de la télédiffusion en Algérie met à la disposition de l'autorité nationale indépendante de régulation de l’audiovisuel ;
- Des règles générales de programmation ;
- De la nécessité de diversifier les opérateurs en prenant garde des pratiques de monopole et d’autres pratiques qui entravent la liberté de concurrence ;
- Du financement et de la perspective du développement des ressources au profit de l’activité audiovisuelle ;
- De la contribution des programmes dans la production nationale ;
- Des proportions d’œuvres artistiques ;
- Des règles applicables à la publicité, au parrainage et au télé-achat.
Le ministre de la communication accorde l'autorisation de création de services audiovisuels dans un délai maximal de quatre mois après la demande.
Toute modification dans la demande, y compris le capital social ou les associés, doit être notifiée au ministre dans un délai d'un mois.
Les services autorisés peuvent insérer des programmes et des journaux d'information dans un délai défini par l'autorité de régulation, à l'exception des services du secteur public économique.
L'attribution de l'autorisation implique la conclusion d'un accord entre l'autorité de régulation et le bénéficiaire, définissant les conditions d'utilisation selon la loi et les clauses du cahier des charges.
La durée de l'autorisation est de dix ans (renouvelable) pour la télévision et la Web TV, et de cinq ans (renouvelable) pour la diffusion sonore et la Web Radio. Le renouvellement est soumis aux mêmes conditions.
Un délai d'un an (pour la télévision et la Web TV) et de six mois (pour la diffusion sonore et la Web Radio) est accordé pour la mise en exploitation. Le non-respect entraîne l'annulation de l'autorisation.
Le titulaire d'une autorisation de service crypté doit fournir à l'autorité de régulation l'accès gratuit aux contenus diffusés.
Un contrat avec l'organisme public de télédiffusion doit être conclu dans les deux mois suivant la notification de l'autorisation.
En cas de vente, le transfert de l'autorisation au nouvel acquéreur est soumis à certaines conditions, avec un droit de préemption de l'État.
En cas de modification des fréquences par l'organisme public de télédiffusion, le titulaire de l'autorisation bénéficie d'une nouvelle fréquence selon la décision de l'instance.
Conditions d’utilisation de l’autorisation
Toute personne morale autorisée à exploiter un service de diffusion télévisuelle ou sonore doit disposer d'une régie finale de diffusion sur le territoire national, indépendamment de la conception de la régie et du support de distribution utilisé.
Une même personne morale de droit algérien peut détenir ou contrôler plus d'un service de communication audiovisuelle, qu'il soit généraliste ou thématique.
Cependant, une personne physique ou morale ne peut détenir des actions ou parts que dans un seul service de communication audiovisuelle autorisé, qu'il soit généraliste ou thématique.
De même, une personne morale de droit algérien peut posséder ou contrôler qu'un seul service de communication audiovisuelle en ligne autorisé, qu'il soit généraliste ou thématique.
La détention d'actions ou parts dans plus d'un service de communication audiovisuelle en ligne autorisé, qu'il soit généraliste ou thématique, est également limitée pour une même personne physique ou morale.
En cas d'interruption de la diffusion pendant plus de soixante jours, le titulaire de l'autorisation doit soumettre un rapport détaillé à l'autorité de régulation sur les raisons de cette interruption.
Si l'interruption n'est pas justifiée, l'autorité de régulation accorde un délai de trente jours pour la régularisation avant d'entamer les procédures d'annulation de l'autorisation.
Responsabilité, droit de réponse et de rectification
Le directeur d'un service de communication audiovisuelle ou en ligne et l'auteur de l'information sont tenus civilement et pénalement responsables de toute information diffusée par le service.
Les demandes de réponse ou de rectification sont soumises à l'autorité de régulation audiovisuelle par des personnes habilitées conformément à la loi organique relative à l'information.
L'autorité de régulation examine les demandes, rédige les communiqués de réponse ou de rectification, et le directeur du service doit les diffuser gratuitement.
Les demandes de réponse ou de rectification doivent préciser les imputations et les informations à corriger. Elles doivent être adressées par lettre recommandée ou par voie d'huissier dans un délai maximum de trente jours.
Le directeur du service doit diffuser le communiqué dans les quarante-huit heures suivant la réception, pendant la période ou les horaires de diffusion du programme en question. Ce délai est réduit à vingt-quatre heures pendant les campagnes électorales.
La réponse ou la rectification doit être annoncée comme relevant du droit de réponse ou de rectification, en faisant référence au titre du programme contenant l'imputation et rappelant la date ou la période de diffusion.
La durée totale du message ne peut excéder deux minutes, et les émissions auxquelles la personne mise en cause a participé sont exclues de l'exercice du droit de réponse ou de rectification.
Autorité nationale indépendante de régulation de l'audiovisuel
Les missions, les attributions, la composition et le fonctionnement de l’autorité nationale indépendante de régulation de l’audiovisuel, sont fixés conformément aux dispositions de l’article 14 de la loi organique n° 23-14 relative à l’information.
Les missions et les attributions de l'autorité sont étendues à l’activité audiovisuelle en ligne.
Missions de l’autorité
L’autorité nationale indépendante de régulation de l’audiovisuel exerce ses missions en toute indépendance, et ses missions sont les suivantes:
- Veiller au respect des dispositions et des principes énoncés par la loi organique relative à l’information et les textes législatifs et réglementaires en vigueur ;
- Veiller au libre exercice de l’activité audiovisuelle dans les conditions définies par la présente loi et par la législation et la réglementation en vigueur ;
- Veiller à l’impartialité des personnes morales exploitant les services de communication audiovisuelle ;
- Veiller à garantir l’objectivité et la transparence des activités audiovisuelles ;
- Veiller à la transparence du financement en matière d'investissement et de fonctionnement des services de communication audiovisuelle ;
- Veiller à la promotion et au soutien des deux langues nationales officielles et de la culture nationale ;
- Veiller, par tous moyens appropriés, au respect de l'expression plurielle des courants de pensée et d'opinion dans les programmes des services de diffusion sonore et télévisuelle, notamment lors des programmes d'information politique et générale ;
- Veiller à ce que tous les genres de programmes, présentés par les éditeurs de services de communication audiovisuelle, reflètent la diversité culturelle nationale;
- Veiller au respect de la dignité humaine ;
- Veiller à la protection de l’enfant et de l’adolescent ;
- Faciliter l’accès des personnes souffrant de déficiences visuelles et/ou auditives aux programmes mis à la disposition du public par toute personne morale exploitant un service de communication audiovisuelle ;
- Veiller à valoriser la protection de l’environnement et de la promotion de la culture environnementale et la préservation de la santé de la population, de façon permanente ;
- Veiller à ce que les évènements nationaux d'importance majeure, définis par voie législative et réglementaire, ne soient pas retransmis en exclusivité de manière à priver une partie importante du public de la possibilité de les suivre en direct ou en différé sur un service de télévision à accès libre.
Attributions de l’autorité
Pour la réalisation de ses missions, il est conféré à l’autorité, les attributions suivantes :
En matière de régulation :
- Emettre un avis technique sur les demandes de création de services de communication audiovisuelle ;
- Etablir les cahiers des charges particulières et les conventions relatifs aux obligations imposées aux services de communication audiovisuelle autorisés ;
- Fixer les conditions dans lesquelles les programmes des services de communication audiovisuelle peuvent comporter des placements de produits ou des programmes de téléachat et des services audiovisuels à la demande ;
- Fixer les règles relatives à la diffusion des messages d'intérêt général, émis par les pouvoirs publics.
En matière de contrôle :
- Veiller à la conformité de tout programme audiovisuel diffusé, quel que soit le support de diffusion utilisé, aux lois et aux règlements en vigueur ;
- Contrôler, en coordination avec l’organisme public chargé d’assurer la gestion de l’utilisation du spectre des fréquences radioélectriques et avec l’organisme chargé de la télédiffusion, l’utilisation des fréquences de radiodiffusion, en vue de prendre les mesures nécessaires pour assurer une bonne réception des signaux;
- S’assurer du respect des quotas minimums réservés à la production audiovisuelle nationale et à l’expression dans les deux langues nationales officielles ;
- Exercer un contrôle sur l’objet, le contenu et les modalités de programmation des messages et des spots publicitaires ;
- Veiller au contrôle de la conformité du volume horaire des messages et des spots publicitaires aux dispositions des cahiers de charges imposés au service de communication audiovisuelle ;
- Veiller à définir le seuil minimum des prix des messages et des spots publicitaires, conformément aux règles de la libre et loyale concurrence et la transparence des pratiques commerciales ;
- Veiller au respect des principes et des règles applicables à l’activité audiovisuelle et à l’application du cahier des charges générales et des cahiers des charges particulières ;
- Requérir, le cas échéant, auprès des éditeurs et distributeurs des services de communication audiovisuelle, toute information utile pour l’accomplissement de ses missions ;
- Recueillir, sans que ne lui soient opposées d'autres limites que celles prévues par la législation et la réglementation en vigueur, auprès des administrations, des organismes et des entreprises, toutes les informations nécessaires à l’élaboration de ses avis et décisions.
L’autorité est habilitée à mettre en place tous mécanismes de vérification et de contrôle des informations fournies, notamment en matière de financement des investissements et du fonctionnement des services de communication audiovisuelle.
En matière d’études et de consultations :
- Elaborer des études sur la stratégie nationale de développement de l’activité audiovisuelle ;
- Formuler des avis sur tout projet de texte législatif ou réglementaire concernant l’activité audiovisuelle ;
- Formuler des recommandations pour le développement de la concurrence dans le domaine des activités audiovisuelles ;
- Participer, dans le cadre des consultations nationales, à la définition de la position de l’Algérie dans les négociations internationales sur les services de diffusion sonore et télévisuelle relatives, notamment aux règles générales d'attribution des fréquences ;
- Coopérer avec les autorités ou organismes nationaux ou étrangers activant dans le même domaine dans le respect de la réglementation en vigueur ;
- Formuler des avis ou des propositions sur la fixation des redevances d’usage des fréquences radioélectriques dans les bandes attribuées au service de radiodiffusion ;
- Formuler un avis technique, sur demande d'une juridiction, sur tout contentieux portant sur l’exercice de l'activité audiovisuelle.
En matière de règlement des différends :
- Arbitrer les litiges opposant les personnes morales exploitant un service de communication audiovisuelle soit entre elles, soient avec les usagers ;
- Instruire les plaintes émanant des partis politiques, des organisations syndicales et/ou des associations et de toute autre personne physique ou morale, alléguant une violation de la loi par une personne morale exploitant un service de communication audiovisuelle.
Composition, organisation et fonctionnement de l’autorité
L'autorité, composée de neuf membres dont le président, est nommée par le Président de la République pour un mandat de cinq ans, renouvelable une fois. Les membres sont choisis parmi des personnalités compétentes et expérimentées dans les domaines journalistique, technique, juridique, économique, et doivent déclarer leur patrimoine.
La fonction des membres est incompatible avec tout mandat électif, emploi public, activité professionnelle liée à un parti politique ou un syndicat, à l'exception des activités d'enseignement supérieur. Ils doivent respecter le secret professionnel, et leur statut et rémunération sont fixés par décret présidentiel.
Le président représente l'autorité dans tous les actes de la vie civile et devant la justice. L'autorité est constituée d'un organe délibérant, le “Conseil", et d'un organe exécutif placé sous l'autorité du président. Le Conseil prend des décisions, émet des avis, et ses décisions sont susceptibles de recours devant les juridictions compétentes.
L'organe exécutif, composé d'un secrétariat général et de services administratifs et techniques, est chargé de préparer et exécuter les délibérations du Conseil. Les services sont dirigés par un secrétaire général nommé par décret présidentiel.
Le président peut donner délégation au secrétaire général pour signer des actes relatifs au fonctionnement des services. Le secrétaire général assiste aux délibérations sans droit de vote.
Chaque année, l'autorité adresse un rapport au Président de la République et aux présidents des deux chambres du Parlement. Le budget de l'autorité inclut des subventions de l'État, des contreparties financières sur les autorisations de création de services audiovisuels, des dons, et des revenus issus de ses activités. La comptabilité est tenue selon les règles de la comptabilité publique, avec un contrôle conformément à la législation en vigueur. Le président de l'autorité est l'ordonnateur des dépenses.
Plateformes numériques de diffusion de services de communication audiovisuelle
L'exercice de l'activité d'opérateur de plate-forme numérique de distribution de services de communication audiovisuelle en Algérie est conditionné par la conclusion d'un contrat avec l'organisme public chargé de la télédiffusion.
Dans ce contexte, tant l'opérateur de plate-forme numérique de diffusion des services de communication audiovisuelle que l'éditeur audiovisuel sont tenus de prendre en charge la responsabilité des contenus diffusés à travers les plateformes de distribution des services de communication audiovisuelle.
Le contrôle des contenus diffusés sur les plateformes numériques de distribution des services de communication audiovisuelle relève de la compétence de l'autorité nationale indépendante de régulation de l'audiovisuel. Cette entité joue un rôle essentiel dans la surveillance et la régulation des contenus afin de garantir le respect des normes et des règlements en vigueur dans le domaine audiovisuel.
Mise en conformité
Les services de communication audiovisuelle et/ou audiovisuelle en ligne qui exercent actuellement sont tenus de conformer leur activité aux dispositions de la loi 23-20 relative à l'activité audiovisuelle dans un délai de douze (12) mois à compter de la date de sa publication au Journal officiel.
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