La pension alimentaire est, au sens juridique, une aide matérielle qu’une personne dans le besoin est en droit de réclamer à certains membres de sa famille. Cette aide est limitée à ce qui est nécessaire pour assurer la subsistance de la personne, et prend, en général, la forme de versements périodiques en somme d’argent (nous verrons, plus loin, que la nouvelle loi pose précisément sa nouvelle définition)
Cette question, comme dans toutes les sociétés modernes, est, en Algérie aussi, au cœur des débats afin de garantir au mieux la sécurité des enfants et des familles monoparentales suite notamment à des divorces. C’est pourquoi, le législateur a souhaité améliorer les conditions afférentes à ces cas de figure au travers d’une loi n°24-01 du 11 février 2024, portant mesures particulières pour l’obtention de la pension alimentaire, promulguée afin de renforcer les dispositifs garantissant le versement des pensions alimentaires aux enfants sous garde et aux femmes divorcées. Cette nouvelle législation marque un tournant dans la protection des droits des bénéficiaires de pensions alimentaires en établissant des procédures claires et efficaces pour assurer leur obtention.
La loi n°24-01 a abrogé la loi n°15-01, qui prévoyait la création d’un fonds de la pension alimentaire, et a introduit des dispositions plus modernes et adaptées à l'évolution sociale et législative. En outre, elle a défini des mécanismes précis pour le traitement des dossiers en cours, qui seront transférés au secrétaire général de la Cour territorialement compétente dès la promulgation de cette nouvelle législation.
Nouvelles définitions apportées par la loi
La loi n° 24-01 portant mesures particulières pour l’obtention de la pension alimentaire a tenu à poser les définitions suivantes de manière claire et irréfutable:
Pension alimentaire : le montant octroyé par voie de justice conformément aux dispositions du code de la famille, au profit d’un ou de plusieurs enfants sous la garde après le divorce de leurs parents et celle octroyée, à titre provisoire, au profit d’un ou de plusieurs enfants, lorsqu’une action en divorce a été introduite.
Redevances financières : le montant versé par l’Etat au créancier de la pension alimentaire, qui est égal au montant de la pension alimentaire.
Créancier de la pension alimentaire : l’enfant ou les enfants sous la garde à qui une pension alimentaire a été octroyée par voie de justice, représentés par la personne exerçant le droit de garde et la femme divorcée à qui une pension alimentaire a été octroyée par voie de justice, au sens du code de la famille.
Débiteur de la pension alimentaire : le père de l’enfant ou des enfants sous la garde à qui une pension alimentaire a été octroyée par voie de justice ou l’ex-époux.
La déchéance du bénéfice des redevances financières : la déchéance du droit de garde ou son extinction conformément aux dispositions du code de la famille, l’établissement du paiement de la pension alimentaire par le débiteur ou la reprise de la vie conjugale.
Conditions du bénéfice des redevances financières
Les redevances financières sont versées en cas de non-exécution, totale ou partielle, de l’ordonnance ou du jugement fixant la pension alimentaire, en raison du refus du débiteur de payer la pension alimentaire, de son incapacité de le faire, de la méconnaissance de son lieu de résidence, ou le fait que le débiteur cesse de la verser après avoir entamé l’exécution de l’ordonnance ou du jugement prononçant la pension alimentaire.
Le constat de non-exécution, totale ou partielle, est établi par un procès-verbal dressé par un huissier de justice.
Conséquences du non-paiement de la pension alimentaire
Le paiement des redevances financières ne décharge pas le débiteur de son obligation de paiement de la pension alimentaire.
Le bénéfice des dispositions de la loi n° 24-01 n’entrave pas la poursuite judiciaire du débiteur pour délit de non-paiement de la pension alimentaire prévu et puni par le code pénal.
Procédures du bénéfice des redevances financières
Présentation de la demande
La demande du bénéfice des redevances financières est présentée au juge compétent en version papier ou par voie électronique, accompagnée d’un dossier comprenant :
- Une copie du jugement prononçant le divorce ou une copie de l'ordonnance ou du jugement qui a confié la garde et attribué la pension alimentaire, s'ils ne sont pas mentionnés dans le jugement prononçant le divorce ;
- Le procès-verbal de non-exécution, totale ou partielle, de l'ordonnance ou du jugement fixant le montant de la pension alimentaire, dressé par un huissier de justice ;
- Un chèque postal ou bancaire barré du bénéficiaire, s'il a choisi ce moyen de paiement ;
- Toute pièce permettant l’identification du créancier et du débiteur de la pension alimentaire.
Communication avec le procureur de la république
Une fois la demande soumise, le juge compétent transmet cette demande au procureur de la République. Cette communication vise à initier une action publique d'office contre le débiteur de la pension alimentaire pour délit de non-paiement. Le procureur de la République peut également recourir à la médiation conformément aux dispositions du code de procédure pénale pour résoudre le différend de manière amiable.
Mise en place d’un bureau dédié
Pour faciliter le processus, un bureau est établi auprès de chaque tribunal, dirigé par un greffier. Ce bureau est chargé de recevoir les demandes de bénéfice des redevances financières ainsi que les dossiers associés. Il est également responsable de l'actualisation et du suivi de ces dossiers.
Émission de l'ordonnance par le juge compétent
Le juge compétent statue sur la demande par ordonnance gracieuse, dans un délai maximum de cinq (5) jours, à compter de la date de dépôt de la demande.
L’ordonnance doit comporter l’identité du créancier de la pension alimentaire, le nombre d'enfants gardés, leur prénom et leur âge ainsi que le montant de la pension alimentaire alloué à chaque créancier et les informations relatives au débiteur de la pension alimentaire.
Elle doit, également, préciser la nature de la pension alimentaire et la date de début du bénéfice des redevances financières.
Notification de l'ordonnance
Une fois rendue, l'ordonnance est notifiée par le greffe au créancier et au débiteur de la pension alimentaire, ainsi qu'au secrétaire général de la Cour, dans un délai maximum de deux jours à compter de son prononcé. Une copie du dossier mentionné précédemment est également obligatoirement jointe à l'ordonnance notifiée au secrétaire général de la Cour.
Versement des redevances financières
Le secrétaire général de la Cour ordonne le versement, par le fonds de la pension alimentaire créé à cet effet, des redevances financières au créancier de la pension alimentaire par tout moyen, notamment par virement bancaire ou postal, dans un délai qui ne peut dépasser vingt-cinq (25) jours, à compter de la date de notification de l’ordonnance.
Les redevances financières continuent d’être versées mensuellement au créancier de la pension alimentaire, sauf sa déchéance ou sa révision par ordonnance.
Le juge compétent statue par ordonnance gracieuse sur toute difficulté entravant le bénéfice de la pension alimentaire, dans un délai maximum de trois (3) jours, à compter de la date de sa saisine, notamment par le secrétaire général de la Cour, le créancier ou le débiteur de la pension alimentaire.
Actualisation des pièces par la personne exerçant le droit de Garde
La personne exerçant le droit de garde doit actualiser et mettre à jour les pièces du dossier déposées auprès du secrétariat général de la Cour chaque année. En cas de défaut ou de changement de situation, le secrétaire général de la Cour saisit par écrit le juge compétent, qui ordonne une enquête sociale avant de statuer sur le devenir des redevances financières.
Création d'une base de données automatisée
Pour une gestion plus efficace, une base de données automatisée est créée auprès du ministère de la justice. Cette base de données contient des informations relatives à la pension alimentaire et est mise à la disposition des autorités judiciaires et des services compétents des ministères concernés. Elle facilite la vérification des documents requis et la coopération intersectorielle.
Gestion des redevances financières par l’état
Le trésorier de wilaya est chargé du paiement des redevances financières. Ce paiement s'effectue sur mandat de versement émis par le secrétaire général de la Cour, dans un délai maximal de dix jours à compter de sa réception.
Recouvrement des redevances
Le trésorier de wilaya est également responsable du recouvrement des redevances financières auprès des débiteurs de la pension alimentaire pour le compte du fonds de la pension alimentaire. Cela se fait conformément à la législation en vigueur et dans un délai ne dépassant pas trente jours à compter de leur versement initial. Le secrétaire général de la Cour collabore en mettant à disposition toutes les informations pertinentes pour faciliter ce recouvrement.
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