En matière de procédure pénale, les mandats sont des instruments juridiques qui revêtent une grande importance dans le cadre des enquêtes et poursuites judiciaires. Pourtant, dans le langage commun, les différences entre les trois régimes applicables ne sont pas toujours évidentes.
Legal Doctrine a donc souhaité mettre en évidence les différentes régimes juridiques prévus par les dispositions du Code de Procédure Pénale algérien relatives aux mandats de dépôt, mandats d'arrêt et mandats d'amener, en éclaircissant les différences entre ces mandats, les conditions de leur délivrance et les procédures qui les régissent.
Le Mandat de dépôt
L’article 117 du code de procédure pénale algérien définit le mandat de dépôt comme l’ordre donné par le juge au surveillant, chef de l’établissement pénitentiaire, de recevoir et de détenir l’inculpé. Ce mandat permet également de rechercher et de transférer l’inculpé lorsqu’il lui a été précédemment notifié.
Notification du mandat de dépôt
La notification du mandat de dépôt à l'inculpé est effectuée par le juge d'instruction, et cette notification est consignée dans le procès-verbal d'interrogatoire.
Conditions de délivrance du mandat de dépôt
Le juge d'instruction ne peut délivrer un mandat de dépôt qu'après avoir interrogé l'inculpé.
En vertu de l'article 59 du code de procédure pénale, un mandat de dépôt peut être émis dans les cas suivants :
- Lorsqu'un délit flagrant a été commis.
- Lorsque l'auteur du délit ne présente pas de garanties suffisantes de représentation.
- Lorsque le fait est punissable d'une peine d'emprisonnement.
En cas de flagrant délit, le procureur est saisi immédiatement. L’affaire est portée à l’audience au plus tard, dans les huit jours du mandat de dépôt.
Ces dispositions ne sont pas applicables en matière de délits de presse, de délits à caractère politique ou d’infractions dont la poursuite est régie par une procédure spéciale ou si les personnes soupçonnées d’avoir participé au délit sont mineures de moins de dix huit ans ou passibles de la relégation.
Délivrance du mandat de dépôt après demande du procureur de la république
Le procureur de la République peut demander au juge d’instruction de délivrer un mandat de dépôt.
Si le juge d’instruction ne satisfait pas à la demande motivée de détention préventive requise par le procureur de la République, le ministère public peut introduire un appel contre ladite décision auprès de la chambre d’accusation qui doit statuer dans le délai de dix (10) jours.
L’agent chargé de l’exécution du mandat de dépôt remet l’inculpé au surveillant chef de l’établissement pénitentiaire, lequel lui délivre une reconnaissance de la remise de l’inculpé.
Suite de la procédure
Lorsque la chambre d'accusation se prononce sur l'appel concernant une ordonnance du juge d'instruction liée à la détention préventive, plusieurs situations peuvent se produire.
Si la chambre d'accusation confirme l'ordonnance initiale, celle-ci reste en vigueur, et le procureur général veille à son exécution. Le dossier est ensuite renvoyé au juge d'instruction pour poursuite de la procédure.
Si la chambre d'accusation annule l'ordonnance du juge d'instruction, deux possibilités se présentent :
- La chambre d'accusation peut décider de prendre en charge elle-même l'affaire et poursuivre l'instruction,
- Ou elle peut renvoyer le dossier au juge d'instruction initial ou à un autre juge d'instruction pour la poursuite de l'enquête. L'ordonnance du juge d'instruction, en cas de confirmation par la chambre d'accusation, reste en vigueur.
Le Mandat d'arrêt
Le mandat d’arrêt est l’ordre donné à la force publique de rechercher l’inculpé et de le conduire à l’établissement pénitentiaire indiqué sur le mandat d’arrêt où il sera reçu et détenu.
Si l’inculpé est en fuite ou s’il réside hors du territoire de la république, le juge d’instruction, après avis du procureur de la République, peut décerner contre lui un mandat d’arrêt si le fait comporte une peine délictuelle d’emprisonnement ou une peine plus grave.
Conditions de délivrance du mandat d'arrêt
Un mandat d'arrêt peut être émis dans les cas suivants:
- Lorsqu'une personne est arrêtée en flagrant délit.
- Lorsqu'il existe un risque que la personne ne se présente pas devant les autorités judiciaires, notamment si elle est en fuite ou réside hors du territoire algérien.
- Lorsque l'infraction comporte une peine délictuelle d'emprisonnement ou une peine plus grave.
La procédure de délivrance d'un mandat d'arrêt commence par une évaluation minutieuse des circonstances de l'affaire par le procureur de la République. Si les critères énoncés ci-dessus sont satisfaits, le mandat d'arrêt peut être décerné.
l’inculpé saisi en vertu d’un mandat d’arrêt, - après être interrogé - est conduit sans délai dans l’établissement pénitentiaire indiqué sur le mandat.
Le surveillant chef de cet établissement délivre à l’agent chargé de l’exécution la reconnaissance de la remise de l’inculpé.
La détention arbitraire
L'article 121 du code de procédure pénale établit une garantie importante pour les personnes arrêtées en vertu d'un mandat d'arrêt. Il indique que si un inculpé est maintenu en détention pendant plus de quarante-huit heures sans avoir été interrogé, cela est considéré comme une détention arbitraire. Tout magistrat ou fonctionnaire qui ordonne ou tolère sciemment une telle détention peut être soumis aux sanctions prévues pour la détention arbitraire.
Conditions de perquisition
L'agent chargé de l'exécution du mandat d'arrêt ne peut pénétrer dans le domicile d'un citoyen qu'entre cinq heures et vingt heures. Il peut être accompagné d'une force suffisante pour assurer l'application du mandat.
Si l'inculpé ne peut être saisi, le mandat d'arrêt est notifié par affichage à son dernier lieu de résidence, en présence de voisins proches. Le mandat d'arrêt et le procès-verbal correspondant sont ensuite transmis au juge mandant.
Mandat d'arrêt international ( Extradition)
Toute demande d’extradition est adressée au gouvernement algérien par voie diplomatique et accompagnée, soit de :
- Un jugement ou d’un arrêt de condamnation, même par défaut ou par contumace,
- Un acte de procédure criminelle ordonnant formellement ou opérant de plein droit le renvoi de l’inculpé ou de l’accusé devant la juridiction pénale,
- Un mandat d’arrêt ou de tout autre acte ayant la même force et décerné par l’autorité judiciaire, pourvu que ces derniers actes renferment l’indication précise du fait pour lequel ils sont délivrés et la date de ce fait.
Les pièces ci-dessus mentionnées doivent être produites en original ou en expédition authentique.
Le gouvernement requérant doit produire en même temps la copie des textes applicables au fait incriminé et joindre un exposé des faits de la cause.
Le Mandat d’amener
Le mandat d’amener est l’ordre donné par le juge à la force publique de conduire immédiatement l’inculpé devant lui.
Il est notifié et exécuté par un officier ou agent de la police judiciaire ou par un agent de la force publique. Celui-ci le présente à l’inculpé et lui en délivre copie.
Le procureur de la République peut décerner un mandat d’amener.
Conditions de Délivrance du Mandat d'Amener
Le procureur de la République peut décerner un mandat d'amener contre toute personne soupçonnée d'avoir participé à un crime flagrant, à condition que le juge d'instruction ne soit pas encore saisi de l'affaire. Lorsque le mandat d'amener est décerné, la personne est immédiatement interrogée par le procureur de la République.
L'article 109 du code de procédure pénale précise que le juge d'instruction peut également décerner un mandat d'amener dans le cadre de ses enquêtes.
Tout mandat d'amener doit indiquer:
- La nature de l'inculpation,
- Les articles de loi applicables,
- L’identité de l'inculpé,
- Date et signature du magistrat qui l'a décerné et revêtu de son sceau.
Ces mandats sont exécutoires sur l'ensemble du territoire de la République et doivent être visés par le procureur de la République avant d'être transmis.
Interrogation immédiate
Lorsqu'une personne est conduite devant le magistrat instructeur en exécution d'un mandat d'amener, l'article 112 du code de procédure pénale exige qu'elle soit immédiatement interrogée. Si l'interrogatoire ne peut avoir lieu immédiatement, l'inculpé est détenu à la maison d'arrêt, mais cette détention ne peut excéder quarante-huit heures. Au terme de ce délai, si l'interrogatoire n'a pas eu lieu, l'inculpé est conduit devant le procureur de la République, qui requiert un magistrat du siège pour procéder à l'interrogatoire. À défaut, l'inculpé est libéré.
Transfert en cas de compétence territoriale
Si l'inculpé recherché en vertu d'un mandat d'amener se trouve en dehors de la circonscription du tribunal du siège du juge d'instruction qui a décerné le mandat, L'inculpé est conduit devant le procureur de la République du lieu de son arrestation, qui procède à l'interrogatoire et transmet ensuite l'inculpé au lieu où siège le juge d'instruction compétent. Si l'inculpé s'oppose au transfèrement en faisant valoir des arguments sérieux contre son inculpation, il est conduit à l’établissement pénitentiaire et un avis immédiat, par les moyens les plus rapides, est donné au juge d’instruction compétent.
Le procès-verbal de la comparution contenant un signalement complet est transmis sans délai à ce magistrat avec toutes les indications propres à faciliter la reconnaissance d’identité, ou à vérifier les arguments présentés par l’inculpé.
Le procès-verbal doit mentionner que l’inculpé a reçu avis qu’il est libre de ne faire aucune déclaration. Le juge d’instruction saisi de l’affaire, décide s’il a lieu, d’ordonner le transfèrement.
Recherches infructueuses et usage de force
Dans les cas où l'inculpé contre lequel un mandat d'amener a été décerné ne peut être trouvé. Dans ce cas, le mandat est remis au commissaire de police, au commandant de brigade de gendarmerie, ou à l'officier de police chef des services de sécurité publique de la commune de résidence de l'inculpé. Ce dernier appose son visa sur le mandat qui est envoyé au magistrat mandant avec un procès-verbal de recherches infructueuses.
Si l'inculpé refuse d'obéir au mandat d'amener après avoir déclaré qu’il est prêt à obéir ou tente de s'évader, il doit être contraint par la force. Le porteur du mandat d’amener emploie dans ce cas la force publique du lieu le plus voisin.
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