Le droit pénal des délinquants mineurs est principalement abordé dans le Livre III du code de procédure pénale algérien (ci-après le “CPP”), intitulé “Des règles propres à l’enfance délinquante” aux articles 442 et suivants. Les juridictions auxquelles les mineurs sont soumis sont abordées dans le Titre II intitulé “des juridictions d’instruction et de jugement pour mineurs délinquants”, aux articles 447 et suivants.
En droit civil, l’article 40 du code civil prévoit que “la majorité est fixée à dix neuf (19) ans révolus.” Or en matière pénale, c’est un peu différent. L’article 442 du code de procédure pénale prévoit, lui, que “la majorité pénale est atteinte à l’âge de dix-huit ans révolus.” Il est également précisé que "l'âge à retenir pour déterminer la majorité est celui du délinquant au jour de l’infraction” (article 443 du CPP).
En raison de sa spécificité et de sa fragilité, le législateur a choisi d’aménager certaines règles pénales lorsque celui qui commet l’infraction n’a pas encore atteint sa majorité, et de le soumettre à des juridictions spécialisées.
Une action publique exercée par le Procureur de la République
L’article 447 du CPP prévoit que “Chaque tribunal comprend une section des mineurs.”
- Pour la poursuite des crimes et délits : l’action publique est exercée par le procureur de la République près le tribunal.
Dans le cas d’infraction dont la loi réserve la poursuite à des administrations publiques, le procureur a seul qualité pour exercer la poursuite sur la plainte préalable de l’administration intéressée.
En matière de délit, lorsque le mineur a des co-auteurs ou complices majeurs, le procureur de la République constitue pour le mineur un dossier spécial dont il saisit le juge des mineurs.
Instruction préalable obligatoire
En cas de crime, qu’il y ait ou non des coauteurs ou complices majeurs, aucune poursuite ne peut être exercée contre un mineur de moins 18 ans, sans que le juge d’instruction ait procédé à une information préalable.
Le juge des mineurs doit procéder à une enquête préalable dès qu’il est saisi.
- Exceptionnellement, lorsque la complexité de l’affaire le justifie, le ministère public peut, à la demande du juge des mineurs, et par réquisitions motivées, faire procéder à une information par le magistrat instructeur.
En matière de délits : c’est la section des mineurs qui est compétente. Elle siège au chef-lieu de la cour et est seule compétente pour connaître des crimes commis par les mineurs.
La section des mineurs territorialement compétente est soit :
- celle du lieu de l’infraction,
- de la résidence du mineur ou de ses parents ou du tuteur,
- du lieu où le mineur a été trouvé ou du lieu où il a été placé, soit à titre provisoire, soit à titre définitif.
Désignation de magistrats spécifiques pour mineurs délinquants
Juge des mineurs
L’article 449 du CPP prévoit la nomination “Dans chaque tribunal siégeant au chef-lieu de la cour” d’ un ou plusieurs magistrats, choisis pour leurs compétences et pour l’intérêt qu’ils portent aux mineurs.
Ces magistrats sont investis des fonctions de juge des mineurs par arrêté du ministère de la justice pour une période de trois années.
Dans les autres tribunaux, les juges des mineurs sont désignés par ordonnance du président de la cour, sur réquisition du procureur général.
Juges d’instruction pour mineurs
Un ou plusieurs juges d’instruction peuvent être chargés spécialement des affaires des mineurs, dans les mêmes conditions que celles des juges de la juridiction de jugement.
En matière d’instruction, la section des mineurs est composée du juge des mineurs, du président, et de deux assesseurs (article 450 du CPP).
Obligations du juge d’instruction
Le juge des mineurs :
- effectue toutes diligences et investigations utiles pour parvenir à la manifestation de la vérité, à la connaissance de la personnalité du mineur et la détermination des moyens propres à sa rééducation (article 453 du CPP);
- peut décerner tout mandat utile en observant les règles du droit commun;
- recueille par une enquête sociale des renseignements sur la situation matérielle et morale de la famille, sur le caractère et les antécédents du mineur, sur son assiduité et son comportement scolaire, sur les conditions dans lesquelles il a vécu ou a été élevé.
- peut ordonner un examen médical et, s’il y a lieu, un examen psychologique. Il décide, le cas échéant, le placement du mineur dans un centre d’accueil ou dans un centre d’observation.
- avise des poursuites les parents, tuteur ou gardien connus (article 454 du CPP)
Le juge d’instruction peut charger de l'enquête sociale les services sociaux ou les personnes titulaires d'un diplôme de service social habilitées à cet effet.
- Le juge des mineurs peut confier provisoirement le délinquant :
1° à ses parents, à son tuteur, à la personne qui en avait la garde, à une personne digne de confiance ;
2° A un centre d’accueil ;
3° A la section d’accueil d’une institution publique ou privée habilitée à cet effet ;
4° Au service public chargé de l’assistance à l’enfance ou à un établissement hospitalier ;
5° A un établissement ou à une institution d’éducation de formation professionnelle ou de soins, de l’Etat ou d’une administration publique habilitée ou à un établissement privé agréé.
S’il estime que l’état physique ou psychique du mineur justifie une observation approfondie, il peut ordonner son placement provisoire dans un centre d’observation agréé.
Régime de la détention des mineurs
La garde provisoire peut, le cas échéant, être exercée sous le régime de la liberté surveillée. La mesure de garde est toujours révocable.
Le mineur de moins de 13 ans : ne peut, même provisoirement, être placé dans un établissement pénitentiaire (article 456 du CPP)
Le mineur entre 13 et 18 ans : ne peut être placé provisoirement dans un établissement pénitentiaire que si cette mesure paraît indispensable ou s’il est impossible de prendre toute autre disposition. Dans ce cas, le mineur est retenu dans un quartier spécial ou à défaut, dans un local spécial. Il est, autant que possible, soumis à l’isolement de nuit.
Issue de l’instruction
Lorsque la procédure lui paraît complète :
- le juge des mineurs communique le dossier, côté par le greffier, au procureur de la République qui doit lui adresser ses réquisitions dans les dix jours au plus tard. (article 457 du CPP)
- soit le juge des mineurs estime que les faits ne constituent ni délit, ni contravention, ou qu’il n’existe pas de charges suffisantes contre le délinquant, il rend une ordonnance de non-lieu
- soit le juge estime que les faits ne constituent qu’une contravention : renvoi de l’affaire devant le tribunal statuant en matière contraventionnelle.
- soit le juge des mineurs estime que les faits constituent un délit: ordonnance de renvoi devant la section des mineurs, statuant en chambre du conseil.
- soit les débats contradictoires ( débats à huis clos, avec présence obligatoire de l’avocat du mineur) révèlent que l’infraction n’est pas imputable au mineur, la section des mineurs prononce sa relaxe.
- soit les débats établissent la culpabilité du mineur : la section des mineurs le constate expressément dans son jugement, admoneste le délinquant et le remet ensuite à ses parents, à son tuteur, à la personne qui en avait la garde ou, s’il s’agit d’un mineur abandonné, à une personne digne de confiance. Elle peut, en outre, ordonner que le mineur soit placé sous le régime de la liberté surveillée, soit à titre provisoire pendant une ou plusieurs périodes d’épreuve dont elle fixe la durée, soit à titre définitif, jusqu’à un âge qui ne peut excéder dix-neuf ans.
Remarques :
- La décision est rendue à huis clos (article 463 du CPP), et pourra faire l’objet d’un appel dans les dix jours de son prononcé. Cet appel est porté devant la chambre des mineurs de la cour.
- La présence d'un conseil, pour assister le mineur dans toutes les phases de la poursuite et du jugement est obligatoire, le cas échéant, il en sera commis un d'office par le juge des mineurs.
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