L’Algérie a toujours mis un point d’honneur à contrôler ses frontières, son économie et par conséquent les entrées sur son territoire. Il peut exister de nombreuses raisons de vouloir exceptionnellement se rendre en Algérie : travail, études, raisons familiales, culturelles… L’obtention d’une autorisation d’entrée pour pénétrer sur le territoire algérien pour un ressortissant étranger est nécessaire. Elle l’est même parfois pour le ressortissant national dans certaines circonstances. Mais ce qui nous intéresse dans cet article est l’autorisation exceptionnelle.
Dans quels cas l’autorisation exceptionnelle peut-elle être demandée ou accordée ? Quelles sont les conditions et modalités de son obtention et pour quelle durée ?
L’autorisation d’entrée exceptionnelle des étrangers
La loi n° 08-11 du 25 juin 2008 relative aux conditions d’entrée, de séjour et de circulation des étrangers en Algérie définit comme étranger « tout individu qui a une nationalité autre qu’algérienne ou qui ne possède aucune nationalité. »
L’étranger est, en ce qui concerne son entrée, son séjour et sa circulation, en territoire algérien, assujetti à l’accomplissement de formalités (visas notamment). Toutefois, nous souhaitons nous intéresser aux autorisations d’entrée exceptionnelles plus particulièrement. Ces exceptions concernent :
- les travailleurs étrangers dont le statut nécessite l’octroi d’une carte professionnelle
- le visa de régularisation délivré à titre exceptionnel (article 12 de la loi 08-11 du 25 juin 2008)
La carte professionnelle
Loi n° 81-10 du 11 juillet 1981 relative aux conditions d’emploi des travailleurs étrangers fixe les conditions d’emploi des travailleurs étrangers selon les besoins du développement national. Ces besoins sont filtrés selon deux critères :
– l’étranger doit avoir un niveau de qualification équivalent au moins à celui de technicien (sauf traité contraire ou statut de réfugié politique ex. : pour les Palestiniens réfugiés en Algérie)
– le dossier du permis de travail doit être motivé par l’organisme employeur pour être reçu au ministère du Travail et est assorti de l’avis des représentants des travailleurs.
Conditions de délivrance de la carte professionnelle
En principe, un étranger souhaitant exercer son activité salariée dans le secteur primaire, secondaire ou tertiaire, en Algérie doit :
– être titulaire d’une carte professionnelle : il s’agit d’un permis de travail ou d’une autorisation de travail temporaire délivrée par les services compétents de l’autorité chargée du travail. Le permis de travail ou l’autorisation de travail temporaire permet au bénéficiaire d’exercer une activité salariée déterminée, valable pour une période donnée, auprès d’un seul et même organisme employeur (article 4 de la loi 81-10) ; même si certaines dérogations restent possibles pour force majeure, octroyée par le ministre du Travail, sur motivation de l’organisme employeur.
Il existe 3 conditions d’octroi de ce permis de travail ou de l’autorisation de travail temporaire, qui ne seront délivrés que si :
- le poste de travail à occuper ne peut, en aucun cas, être pourvu par un travailleur national, que ce soit par voie de promotion interne ou par voie de recrutement externe, y compris la main-d’œuvre nationale émigrée,
- le travailleur étranger possède les titres, diplômes et qualification professionnelle nécessaires à l’emploi à occuper,
- le contrôle sanitaire confirme que celui-ci satisfait aux conditions déterminées par la réglementation en vigueur.
Modalités de délivrance de la carte professionnelle
C’est le décret exécutif n° 06-454 du 11 décembre 2006 relatif à la carte professionnelle délivrée aux étrangers exerçant sur le territoire national une activité commerciale, industrielle et artisanale ou une profession libérale qui détermine les conditions et modalités de délivrance de la carte professionnelle.
Principales étapes
Retrait de l’imprimé : la demande doit être effectuée sur imprimé spécial à retirer auprès de la direction chargée de la réglementation et des affaires générales de la wilaya territorialement compétente.
Dépôt de la demande : la demande est déposée par l’intéressé auprès de la direction chargée de la réglementation et des affaires générales de la wilaya du lieu de sa résidence ou du lieu d’implantation du local commercial ou du siège social de la société pour les membres dirigeants des sociétés commerciales.
Délivrance d’un récépissé : La direction chargée de la réglementation et des affaires générales de la wilaya délivre à l’intéressé un récépissé de dépôt.
Paiement d’une taxe : La délivrance de la carte professionnelle est soumise au paiement d’un timbre fiscal (à la charge du bénéficiaire)
Remise de la carte : Le bénéficiaire de la carte professionnelle sera toutefois tenu de la restituer à l’autorité administrative qui a procédé à son établissement, lorsqu’il quitte définitivement le territoire national (article 16 du décret)
Durée de validité du permis de travail : 2 années maximum. Renouvelable 60 jours avant la date d’expiration de la carte.
Cas de retrait du permis : le législateur prévoit qu’il peut être décidé de retirer le permis de travail ou l’autorisation au travailleur étranger s’il contrevient à la réglementation en vigueur c’est à dire que :
– soit les informations et documents présentés se révèlent inexacts,
– soit le travailleur étranger ne respecte pas les conditions prévues (activité salariée déterminée, valable pour une période donnée, auprès d’un seul et même organisme employeur, qualification nécessaire à l’emploi occupé, contrôle sanitaire en règle, respect de la préférence salariale nationale)
Le décret n° 06-454 précise les hypothèses dans lesquelles la carte peut être retirée au bénéficiaire, notamment en cas :
– de fausses déclarations ;
– de faillite ;
– de condamnation pour crime ou délit de droit commun ;
– de décès ;
– de cessation des activités de la société au titre de laquelle la carte professionnelle a été délivrée ;
– de fin de fonction ou de démission des administrateurs ou des gestionnaires des sociétés ;
– de perte de la qualité de commerçant ;
– de radiation du registre du commerce ou de l’artisanat ;
– de radiation de l’ordre ou de cessation définitive de la profession.
À la sanction de retrait de la carte pourra s’ajouter une potentielle décision d’expulsion. L’employeur ou l’étranger exerçant à titre particulier ont 30 jours pour en informer l’autorité compétente pour annulation de la carte (article 12 du décret).
Elle ne peut être renouvelée plus d’une fois dans l’année.
Attention : Les travailleurs étrangers appelés, à titre exceptionnel, pour effectuer des travaux n’excédant pas quinze (15) jours et sans que le total cumulé des durées de présence n’excède trois (3) mois dans l’année n’ont pas besoin d’autorisation de travail temporaire
Avant l’expiration du contrat de travail, le travailleur étranger pourra mettre un terme à son contrat avec respect d’un préavis de 15 jours au moins, sur motivation valable. L’employeur devra prévenir les services de l’emploi territorialement compétent dans les 48 H (le travailleur devra donc restituer son titre sous 15 jours).
Après expiration du contrat de travail pour lequel il est tenu, le travailleur étranger peut être autorisé exceptionnellement, à travailler pour un autre employeur. Il lui faudra l’autorisation de l’employeur précédent.
Après l’obtention d’une carte professionnelle, le travailleur étranger a 90 jours pour faire une demande d’une carte de résident étranger (cela ne s’applique pas pour les membres étrangers des conseils d’administration, de surveillance et organes de gestion).
NB : Une personne physique peut obtenir une carte professionnelle si
- pour une activité commerciale : il s’inscrit au registre du commerce
- une activité artisanale : il s’inscrit au registre de l’artisanat et des métiers
- une activité libérale : il s’inscrit au tableau de l’ordre régissant la profession.
Sanction du défaut de respect de la procédure
Côté employeur : La loi n° 81-10 punit d’une amende de 5 000 DA à 10 000 DA par infraction constatée, tout employeur qui occuperait un travailleur étranger qui :
- ne serait pas muni de ces documents,
- ou serait en possession d’un titre périmé,
- ou serait employé dans une fonction autre que celle mentionnée sur lesdits documents.
Côté salarié : un travailleur qui aurait autorisé l’emploi d’un travailleur étranger sans permis ou autorisation = 1 000 DA à 5 000 DA appliqué autant de fois qu’il y a d’infractions. La récidive est également sanctionnée avec une peine pouvant aller jusqu’à 6 mois d’emprisonnement. + sanctions disciplinaires
Côté travailleur étranger : s’il contrevient aux dispositions de la loi = amende de 1 000 DA à 5 000 DA et emprisonnement de dix (10) jours à un mois, ou l’une des deux peines seulement + sanctions administratives.
Le visa de régularisation pour les cas d’urgence
L’article 12 de la loi n° 08-11 du 25 juin 2008 relative aux conditions d’entrée, de séjour et de circulation des étrangers en Algérie prévoit un cas supplémentaire d’autorisation d’entrée exceptionnelle sur le territoire algérien.
En cas d’urgence, un visa de régularisation peut être délivré à titre exceptionnel par la police des frontières à l’étranger qui se présente aux postes-frontière sans visa.
La durée de validité du visa est déterminée par voie réglementaire.
Dans ce cas, la police des frontières informe immédiatement les autorités administratives concernées.
La durée ne peut excéder 90 jours.
Le visa de transit
Un visa de transit peut être délivré à l’étranger transitant par le territoire algérien, titulaire du visa du pays de destination et justifiant de moyens de subsistance suffisants pour la durée de son transit (article 14 de la loi 08-11)
Durée maximale du visa : 7 jours.
Le laissez-passer consulaire
L’hypothèse est celle d’un ressortissant algérien non immatriculé qui souhaite rentrer en Algérie. Il pourra lui être délivré un titre exceptionnel de voyage, notamment en cas de perte ou de vol de son passeport.
Il est valable uniquement pour le retour en Algérie, pour un seul voyage et par la voie la plus directe. Il peut être établi sur la présentation des pièces suivantes :
- une déclaration de perte ou de vol délivrée par le consulat sur la base de celle établie par le commissariat de police le plus proche.
- Un justificatif de la nationalité algérienne par la production d’une copie de passeport s’il ya lieu, d’une carte nationale d’identité algérienne ou d’un livret militaire comportant une photo d’identité.
- Trois photos d’identité récentes, de face et de même tirage (de format 3,5 x 4,5 cm).
- Un titre de transport.
La demande de laissez - passer consulaire devra être introduite 72 h avant le départ.
Vous êtes abonné ? Restez à jour en consultant les notes, communiqués et circulaires ainsi que l’ensemble des Codes en vigueur sur Legal Doctrine.
Restez à l’affût des dernières actualités juridiques en vous abonnant à notre newsletter Legal Doctrine.