En matière de santé publique, l’accès aux soins pour les populations les plus vulnérables constitue un enjeu majeur d’équité sociale. Depuis plusieurs décennies, l’Algérie a multiplié les efforts pour garantir une couverture médicale à l’ensemble de ses citoyens. Toutefois, une catégorie de la population restait souvent en marge du système : les démunis non-assurés sociaux, c’est-à-dire les personnes ne bénéficiant d’aucune forme de couverture par les caisses de sécurité sociale, souvent du fait de leur précarité ou de leur exclusion administrative.
Pour répondre à cette problématique, l’État avait déjà adopté en 2001 le décret exécutif n° 01-12 du 21 janvier 2001, qui définissait les premières modalités de prise en charge médicale pour ces personnes. Bien qu’innovant à l’époque, ce dispositif s’est progressivement révélé insuffisant, inadapté et parfois inégalement appliqué, notamment dans le contexte d’un système de santé en pleine mutation.
Dans un souci de modernisation, d’harmonisation juridique et d’élargissement de l’accès aux soins, le gouvernement a adopté un nouveau décret exécutif n° 24-287 du 22 août 2024, abrogeant l’ancien texte et introduisant des mesures plus ambitieuses. Ce décret s’inscrit dans le cadre de la loi de finances 2024, qui a consacré un budget spécifique à la prise en charge médicale gratuite des démunis sans couverture sociale, incluant notamment l’accès aux médicaments essentiels.
Ce nouveau dispositif traduit une volonté claire des pouvoirs publics de renforcer la justice sociale et d’assurer l’universalité des soins, conformément aux principes énoncés dans la Constitution algérienne, qui garantit le droit à la santé pour tous. Il marque une étape importante dans la réforme du système national de santé, en introduisant des modalités d’identification, de traitement, de financement et de coordination interinstitutionnelle plus rigoureuses.
Bénéficiaires et conditions d’accès
Le décret cible spécifiquement les personnes démunies sans revenu et non assurées sociales, notamment celles atteintes de maladies chroniques et leurs enfants mineurs à charge. Ces individus peuvent désormais bénéficier d’un accès gratuit aux médicaments essentiels.
Pour obtenir cette prise en charge, les personnes concernées doivent s’inscrire auprès du service des affaires sociales de leur commune, sur la base d'un dossier qu'ils déposent personnellement ou par leur représentant légal, en contrepartie de la remise d'un récépissé de dépôt.
Dossier
Le dossier prévu ci-dessus, doit comprendre les pièces suivantes :
- Une demande signée par le concerné, ou par son représentant légal ;
- Un extrait de naissance ;
- Une fiche familiale d'état civil pour les personnes mariées ;
- Un certificat de résidence à jour ;
- Une photo d'identité ;
- Une attestation de non revenu délivrée par les services concernés ;
- Des attestations de non affiliation à aucun organisme de sécurité sociale ;
- Un rapport médical rédigé par un médecin spécialiste des établissements publics de santé, attestant que le concerné est atteint d'une maladie chronique ;
- Une déclaration sur l'honneur, signée et légalisée, par laquelle l'intéressé déclare être en conformité avec les dispositions du décret exécutif n° 24-287.
Processus de validation et distribution des médicaments
Les dossiers complets sont transmis à une commission spécialisée créée au sein de chaque wilaya. Cette commission, présidée par le directeur de l'action sociale, est chargée d’examiner les demandes et de statuer sur leur validité dans un délai de 15 jours.
En cas d’acceptation, une carte d’accès gratuit aux médicaments est délivrée aux bénéficiaires par la Caisse nationale des assurances sociales des travailleurs salariés (CNAS).
Cette carte permet aux personnes concernées d’obtenir les médicaments auprès de pharmacies conventionnées.
Suivi et mise à jour des dossiers
Afin de garantir la continuité de la prise en charge, les titulaires de la carte doivent actualiser chaque année certains documents, tels que:
- Le certificat de résidence;
- L’attestation de non-revenu.
Et ce auprès des services compétents. De plus, la CNAS se charge de la mise à jour régulière de la liste des bénéficiaires.
Financement et transparence
Les dépenses liées à la fourniture des médicaments sont couvertes par les crédits alloués annuellement au ministère de la Solidarité nationale. Un mécanisme de contrôle est prévu, avec l'obligation pour la CNAS de présenter tous les six mois une facture détaillée au directeur de l’action sociale de chaque wilaya, justifiant les montants engagés.
Vous êtes abonné ? Restez à jour en consultant les notes, communiqués et circulaires ainsi que l’ensemble des Codes en vigueur sur Legal Doctrine.
Restez à l’affût des dernières actualités juridiques en vous abonnant à notre newsletter Legal Doctrine.