Les plages ouvertes à la baignade constituent des espaces de détente et de loisirs. L’un des principes généraux de la loi fixant les règles générales d’utilisation et d’exploitation touristiques des plages est le principe de gratuité et de libre circulation. Cette gratuité doit, qui plus est, être appuyée par un processus d’affichage publicitaire qui devrait être géré par les services de la commune. Pourtant l’exploitation sauvage des plages bordant le littoral algérien est de plus en plus fréquente, allant parfois même jusqu’à incommoder les baigneurs contraints de se déplacer pour laisser place à un commerce illégal de plus en plus envahissant et agressif. En effet, sur plusieurs plages autorisées à la baignade, des personnes s’approprient des espaces et imposent leurs équipements, tels que les parasols, chaises, transats…Au point de ne pouvoir s’y installer qu’à condition de contracter une location quasi “forcée”.
Quelles peuvent être les conséquences d’une exploitation sauvage des plages ouvertes à la baignade? Quel sont les droits des baigneurs, en tant qu’utilisateur de l’espace public face à une utilisation marchande et donc inappropriée de cet espace alors que la gratuité des plage est l’un des principes fondamentaux de la loi n 03-02 du 17 février 2003 fixant les règles générales d’utilisation et d’exploitation touristiques des plages?
Cadre juridique
- Loi n 03-02 du 17 février 2003 fixant les règles générales d’utilisation et d’exploitation touristiques des plages.
- Décret exécutif n° 04-274 du 5 septembre 2004 fixant les conditions et les modalités d'exploitation touristique des plages ouvertes à la baignade.
- Arrêté interministériel du 18 mai 2006 définissant les modèles-types de la convention et du cahier des charges de concession d’exploitation touristique des plages ouvertes à la baignade.
Définitions
La loi 03-02 définit la plage comme une “bande territoriale du rivage naturel qui englobe la zone recouverte par les plus hauts flots de l'année dans les circonstances météorologiques normales, et les dépendances qui leur sont attenantes, qui, en raison de leur situation et de leur faisabilité touristique, sont délimitées à l'effet de recevoir certains aménagements en vue de leur exploitation touristique.”
Le principe de gratuité des plages
Selon l’article 5 de la loi n 03-02 du 17 février 2003 fixant les règles générales d’utilisation et d’exploitation touristiques des plages, l'accès aux plages est gratuit et la gratuité de l'accès doit être clairement affichée sur des panneaux publicitaires installés par les services communaux à cette fin.
En revanche, l'article 6 de la loi 03-02 indique que l'utilisation des équipements et les services fournis par l'exploitant aux estivants sont payants.
Conditions et modalités d’exploitation des plages
L'exploitation des plages se fait par le biais d’une concession octroyée par le wali territorialement compétent et ce, conformément à un cahier des charges bien précis défini par la loi, qui lui établit les conditions techniques, administratives et financières de la concession. En revanche, le concessionnaire est obligé de garantir la libre circulation des estivants sur toute la plage, selon une bande littorale dont la largeur est définie dans le cahier des charges. Or, le cahier des charges ne détermine pas toujours cette distance pourtant capitale !
Une plage peut être exploitée par un ou plusieurs concessionnaires, et ce, conformément à son plan d'aménagement et le concessionnaire de la plage est tenu au respect des règles de bonne moralité et de porter, à la connaissance du public,les horaires et les tarifs concernant ses divers services. Or, ces exploitants sauvages installent leurs équipements sans toujours respecter ces obligations d’informations, exposant les utilisateurs à des dérives de tarifs arbitraires voire parfois abusifs.
Conditions d'octroi de la concession
Seules les personnes qui remplissent les conditions ci-après peuvent déposer leur soumission pour l'exploitation touristique d'une plage :
- Disposer des moyens humains et matériels nécessaires à l'activité,
- Disposer d'une caution bancaire destinée à couvrir leurs engagements dont le montant sera fixé par le wali territorialement compétent ;
- Être inscrit au registre du commerce.
Est ce à dire que les estivants devraient pouvoir être en droit de demander un justificatif de la conformité de l’autorisation d’exploitation des plages sur lesquelles ils décident d’être clients? La logique mènerait à répondre par la positive, même si en pratique, nous pensons que cela serait plus difficile à mettre en œuvre. D'où l'intérêt pour tout bon exploitant de procéder à un affichage de ses documents en règle justifiant d’une monétisation de ces sphères publiques.
De plus, à leur soumission sont joints:
- L'identité du demandeur, personne physique ou les statuts de la société pour les personnes morales;
- Les documents certifiant la constitution de la caution bancaire ;
- La copie de l'inscription au registre du commerce ;
- La preuve de l'existence du capital ;
- Les informations relatives à l'organisation de l'exploitation prévue.
Cahier des charges pour l'exploitation des plages
L’exploitation des plages se fait par la voie de la concession selon un cahier des charges qui fixe les caractéristiques techniques, administratives et financières de la concession. La concession est approuvée par voie réglementaire.
Le concessionnaire est tenu de garantir la libre circulation des estivants tout le long de la plage objet de la concession, sur une bande littorale dont la largeur est déterminée dans le cahier des charges. Pourtant l’arrêté interministériel du 18 mai 2006 définissant les modèles-types de la convention et du cahier des charges de concession d’exploitation touristique des plages ouvertes à la baignade ne définit pas la largeur de la bande littorale où les estivants ont droit à la libre circulation et énonce en son article 7 un modèle de clause rédigé en ces termes :
“ Le concessionnaire est responsable de la direction de l'exploitation.
A ce titre, il est tenu :
—de garantir la libre circulation des estivants le long de la plage sur une bande littorale de …..................”
S’agit-il d’une carence qui participe au libre court à l’arbitraire de ces exploitations sauvages qui défie une réglementation pourtant existante? Il y paraît…
Dispositions pénales
Autorités habilitées à rechercher et constater les infractions
Les autorités habilités à rechercher et à constater les infractions aux dispositions précitées sont :
- Les officiers et agents de police judiciaire,
- Les inspecteurs du tourisme (dépendent directement du Ministère du tourisme sans que le décret 08-302 fixant le statut particulier des fonctionnaires appartenant au corps des inspecteurs du tourisme ne soit très parlant sur le rôle de ces inspecteurs);
- Les inspecteurs des prix et des enquêtes économiques,
- Les inspecteurs du contrôle de la qualité et de la répression des fraudes,
- Les inspecteurs de l'environnement.
Sanctions et pénalités
En cas de non respect des obligations figurant dans le cahier des charges, le wali territorialement compétent, sur rapport du directeur de wilaya chargé du tourisme, met en demeure le contrevenant à l'effet de se conformer à ses obligations.
Dans le cas où le contrevenant refuserait de se conformer à la première injonction dans la semaine qui suit sa notification, il est mis en demeure une seconde fois. A l’issue, s’il est toujours contrevenant au cahier des charges, il est procédé au retrait de la concession à la charge du concessionnaire sans préjudice des poursuites judiciaires.
En cas d’exploitation des plages sans obtention du droit de concession
ATTENTION : Toute exploitation touristique des plages sans l'obtention du droit de concession est punie d'une peine d'emprisonnement de trois (3) mois à une (1) année et d'une amende allant de cent mille dinars (100.000 DA) à trois cent mille dinars (300.000 DA) ou de l'une de ces deux peines.
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