Le viol est un crime que les sociétés connaissent depuis toujours, et dont peuvent être victimes, femmes, hommes ou enfants. Le viol fait l'objet d'une répression stricte notamment pour sa gravité et les conséquences traumatiques qu'il provoque sur les victimes. Le législateur algérien ne donne pas de définition pour le viol, néanmoins, il aborde le sujet dans le code pénal dans la section "attentats aux mœurs" ainsi qu'à la section dédiée aux crimes d’outrage public à la pudeur, l’inceste…
Selon les différentes définitions issues de la doctrine, nous pouvons définir le viol comme suit :
Le viol est un acte à caractère sexuel, il se caractérise par la pénétration (objet, doigt, sexe…) de l’agresseur sur la victime commise avec violence, pression ou surprise, sans le consentement de cette dernière. Il y a donc un élément matériel (l’acte de pénétration) et un élément moral (le défaut de consentement de la victime). Ce crime peut créer des lésions traumatiques et psychiques très graves chez leur victime.
Quelles sont les conditions du viol ? Comment le droit pénal algérien le réprime t-il ?
La répression pénale du viol
L’article 336 l’ordonnance n° 66-156 du 8 juin 1966 portant code pénal, modifiée et complétée prévoit que :
“Quiconque a commis le crime de viol est puni d’une condamnation de prison allant de cinq (5) à dix (10) ans.
S’ajoute à cela que “si le viol a été commis sur un mineur de moins de dix-huit (18) ans (de seize ans (16) ans dans l’ancienne version du code pénal avant modification), la peine d'emprisonnement serait de dix (10) à vingt (20) ans.”
Le législateur a donc souhaité faire de la minorité d’une victime un facteur aggravant.
Par une jurisprudence en date du 19 mars 2015, la Cour Suprême a déterminé les conditions pour qualifier le crime de viol. En l’espèce, il s’agissait d’une femme enceinte affirmant que l’origine de sa grossesse était due à un viol. La question était de savoir si la filiation du présumé coupable était suffisante pour qualifier un crime de viol.
La Cour Suprême répond par la négative en déterminant deux conditions pour qu’un crime soit qualifié de viol.
Ainsi, selon la décision de la cours suprême, le crime de viol repose sur deux conditions cumulatives :
- l’acte matériel qui désigne la violence physique exercée par l’agresseur (la pénétration, par quelque moyens que ce soit).
- l’acte moral qui est le non-consentement au rapport sexuel.
Les facteurs aggravants du viol
Il existe des circonstances aggravantes du viol. L’acte moral peut être aggravé par l'utilisation d’hypnose, de sédatif ou de drogues pour violer la personne. L’utilisation de la contrainte, de la menace, constituent également des facteurs aggravants. De même, les liens d’ascendance ou de descendance familiale font partie de ces facteurs aggravants.
L’article 337 du code pénal prévoit que “Si les coupables sont
- les ascendants de la personne sur laquelle a été commis l’attentat ou le viol,
- s’ils sont de la classe de ceux qui ont autorité sur elle,
- s’ils sont ses instituteurs ou ses serviteurs à gages, ou serviteurs à gages des personnes ci-dessus désignées,
- s’ils sont fonctionnaires ou ministres d’un culte,
- ou si le coupable, quel qu’il soit, a été aidé dans son crime par une ou plusieurs personnes (le complicité de viol étant donc punie de la même manière que le crime lui-même),
la peine est celle de la réclusion à temps, de dix (10) à vingt (20) ans, dans le cas prévu à l’alinéa premier de l’article 334, et de la réclusion perpétuelle, dans les cas prévus aux articles 335 et 336.”
Et bien que la Cour suprême considère que la filiation n’est pas considérée comme une condition du crime de viol, il y a une différence entre condition et facteur d’une circonstance aggravante.
Le code pénal énumère les liens d’ascendance ou de descendance familiale (horizontale et verticale) à l’article 337 bis comme suit :
- parents en ligne descendante ou ascendante ;
- frères et sœurs germains, consanguins ou utérins ;
- une personne et l’enfant de l’un de ses frères ou sœurs germains, consanguins ou utérins ou avec un descendant de celui-ci ;
- la mère ou le père et l’époux ou l’épouse, le veuf ou la veuve de son enfant ou d’un autre de ses descendants ;
- parâtre ou marâtre et le descendant de l’autre conjoint ;
- des personnes dont l’une est l’épouse ou l’époux d'un frère ou d’une sœur.
La peine est de dix (10) ans à vingt (20) ans de réclusion dans les 1er et 2ème cas, de cinq (5) ans à dix (10) ans d’emprisonnement dans les 3ème, 4ème et 5ème cas et de deux (2) ans à cinq (5) ans d’emprisonnement dans le 6ème cas.
Les relations sexuelles entre le titulaire du droit de recueil légal (kâfil) et l’enfant recueilli (makfoul) sont passibles de la peine prévue pour l’inceste commis entre parents en ligne descendante ou ascendante. La condamnation prononcée contre le père, la mère ou le titulaire du droit de recueil légal (kâfil) comporte la déchéance de la tutelle et /ou du recueil légal.
Toutefois, ces infractions, bien que pouvant être prises en compte comme circonstance aggravante du viol, répondent davantage à une infraction bien spécifique qu’est l’inceste. Le code pénal incrimine également au même titre l’acte homosexuel.
Le Code pénal algérien n’aborde pas le viol conjugal. Et dans son ensemble, au vu de la gravité des faits que constitue le crime de viol, il semblerait que la loi soit encore assez lacunaire à ce sujet.
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